jeudi 31 mai 2012

Assise au bord de la route


Sentado A Beira Do Caminho



Il y a des découvertes tardives... Tania Maria a  64 ans, elle a enregistré 27 albums. Le 28ème en cours.... Elle a été joué de par tout le monde avec les plus grands. Bien connue en France où elle a été découverte par Claude Nougaro. Elle navigue entre jazz et bossa. Elle aurait pu être dans un B.O. d'Almodovar. Et voilà qu'en flânant sur les ondes de TSF je l'ai entendue pour la première fois. 
Sa musique est lumineuse, comme doit être le Brésil. Son pays. Sa voix est profonde, touche au plus profond. Elle peut faire sonner son piano comme des percussions. Elle fait exprime et fait ressentir un tel rythme que le corps se met à vibrer, à danser doucement. 
Ça doit être pour ça que le titre de son album est Tempo.
Elle y joue avec le contrebassiste Eddie Gomez qui jouait avec Bill Evans, pianiste qui m'a permis de passer du monde classique au monde du jazz. 
Il fait bien plus que l'accompagner, c'est un vrai dialogue qui s'est instauré entre eux.
Enfin voilà c'est un disque qui fait du bien, qui illumine une journée.




Sentado a beira do caminho (assis au bord du chemin)






Eu não posso mais ficar aqui a esperar
Que um dia, de repente, você volte para mim
Vejo caminhões e carros apressados a passar por mim
Estou sentado à beira de um caminho que não tem mais fim
Meu olhar se perde na poeira dessa estrada triste
Onde a tristeza e a saudade de você ainda existem
Esse sol que queima no meu rosto um resto de esperança
De ao menos ver de perto o seu olhar que eu trago na lembrança

Preciso acabar logo com isso
Preciso lembrar que eu existo

Vem a chuva, molha o meu rosto e então eu choro tanto
Minhas lágrimas e os pingos dessa chuva
Se confundem com o meu pranto
Olho pra mim mesmo, me procuro e não encontro nada
Sou um pobre resto de esperança à beira de uma estrada

Preciso acabar logo com isso
Preciso lembrar que eu existo

Carros, caminhões, poeira, estrada, tudo, tudo
Se confunde em minha frente
Minha sombra me acompanha
E vê que eu estou morrendo lentamente
Só você não vê que eu não posso mais ficar aqui sozinho
Esperando a vida inteira por você, sentado à beira do caminho

Preciso acabar logo com isso
Preciso lembrar que eu existo



Tania Maria: Tempo
Pour écouter l'album 

samedi 5 mai 2012

Un peu de couleur.



Klee- route principale, routes secondaires - 1929



 J'ai toujours aimé les toiles de Paul Klee. Ses toiles trouvent une résonnance en moi. C'est intuitif, jamais vraiment réfléchi ou analysé. Peut-être pour préserver l'émotion brute en conservant ma naïveté face à celle qu'il a su exprimer dans ses toiles.
Toujours est-il que l'on m'a offert un livre sur Klee récemment et que j'ai eu tout le temps de le dévorer. Je me suis surprise à prendre des notes sur les choses à approfondir.

La première, était qu'il avait été fortement influencé par Robert Delaunay. Je m'étais intéressée à Delaunay par un hasard fortui. Le square en bas de chez moi portait à l'époque le nom de square Sonia et Robert Delaunay. Un petit tour à Beaubourg et dans quelques livres d'art moderne m'a vite fait aimer leur peinture. J'aimais leur travail sur la couleur et la lumière, qu'ils en face l'objet essentiel du tableau. J'aimais l'idée qu'ils travaillent ensemble.

Le travail de Delaunay repose sur la loi du contraste simultané des couleurs énoncée en 1839 par le chimiste Eugène Chevreul dans laquelle il démontre que lorsque l’œil perçoit une couleur, il cherche automatiquement la couleur complémentaire et la compose lui-même s’il ne la trouve pas. 
Si on fixe le carré rouge de l'mage de gauche pendant environ une minute et que l'on fixe le carré blanc ensuite on voit apparaître une tâche bleue en son milieu.




Ainsi toute couleur perçue appelle sa complémentaire pour exister et la couleur propre d'un objet est dépendante de la couleur des objets environnants. 



Comme je ne l'utilise pas tous les jours, je me suis dis qu'un petit rappel sur les basiques des couleurs serait être utile. Voici un graphique synthétisant les couleurs primaires (rouge, bleu, jaune), secondaires (violet, vert, orange) et complémentaires (rouge - vert, bleu - orange, jaune - violet)...







 Il prouva  qu'une couleur forte, comme le rouge, avait tendance à illuminer  les couleurs avoisinantes de sa complémentaire, le vert, c'est-à-dire à les altérer.



Et donc, la simple juxtaposition de couleurs permet de créer des jeux de contrastes différents. L'effet produit par la juxtaposition d'une couleur et de sa complémentaire crée un sorte de vibration, crée du mouvement.




Pour illustrer, si l'on prend 2 carrés bleus identiques placés au centre de deux couleurs différentes, ils semblent se différencier selon la couleur qui les entoure. 

L'orange autour du carré bleu de gauche crée un contraste plus fort, l'orange est la couleur complémentaire du bleu.

Le violet autour du carré de droite est une couleur voisine du bleu sur le cercle chromatique, le contraste est plus faible.




Même exemple avec le Jaune et sa complémentaire le Violet.




Le Rouge et sa complémentaire le Vert.

On retrouve bien ce jeu de contraste des couleurs dans les toiles de Delaunay!!!! Après avoir d'abord substitué la couleur à ligne pour produire les formes puis, déconstruit les formes de manière géométrique pour les reconstruire par la couleur (Cézanne, Matisse...), il aboutit à une "peinture pure", abstraite, où la couleur est forme et sujet (Sonia Delaunay, contrastes simultanés, 1912).


« J'eus l’idée à cette époque d’une peinture qui ne tiendra techniquement que de la couleur, des contrastes, mais se développant durant le temps et se percevant simultanément, d’un seul coup ». 
Robert Delaunay - 1913 «  De la lumière »





Robert Delaunay - Disque simultané



Robert Delaunay - Joie de vivre


Il a élaboré une méthode personnelle que l'on retrouve dans les Disques et les Formes circulaires qu'il a peinte. Il regarde fixament le soleil ou la lune et traduit dans ses toiles les impressions imprimées par la lumière sur sa rétine. 


« Robert voulait regarder en face le soleil de midi, le disque absolu. […] Il se forçait à le fixer jusqu’à l’éblouissement. Il baissait les paupières et se concentrait sur les réactions rétiniennes. De retour à la maison, ce qu’il cherchait à jeter sur la toile, c’était ce qu’il avait vu les yeux ouverts et les yeux fermés ; tous les contrastes que sa rétine avait enregistrés. – Sonia, je vois les points noirs du Soleil… Il avait découvert des taches en forme de disques. Il allait passer de la couleur prismatique aux formes circulaires ». (Sonia Delaunay, Nous irons jusqu’au soleil, 1978)



Robert Delaunay - Formes circulaires, Soleil n°2

Ce tableau repésente le processus de perception de la lumière du soleil par l'oeil. On retrouve les trois couleurs primaires aux extrémités: le bleu, le rouge et le jaune. Entre ces couleurs primaires apparaissent des couleurs secondaires, obtenues par mélange des premières : orange, vert et violet. L'ensemble tourbillonne autour du centre, la couleur originelle et finale, le blanc. 


On retrouve bien cette même utilisation de la couleur dans toute l'oeuvre de Paul Klee et notamment "Route principale, routes secondaires". Il a réalisé cette toile en 1929, à Weimar en Allemagne, après un voyage qu'il fit en Egypte en 1928. 
Il a beaucoup travaillé en déconstruisant, divisant et récomposant des paysages, les reconstruisant par la juxtaposition de carrés couleurs. 
On peut voir une tapisserie orientale, ou un paysage vu de haut que l'on survolerait.On peut suivre la route principale ou suivre d'autres voies, se perdre dans les dédales... Certains l'interprètent aussi comme une partition, une polyphonie. Chaque carré représentant une note.


Klee utilise ici le principe du contraste simultané de Chevreuil pour illuminer sa toile. Il juxtapose des carrés de couleurs complémentaires bleu/orange, rouge/vert, jaune/ bleu-violet.


Je ne me suis intéressée pour l'instant qu'au contraste mais qu'en est-il de du choix de l'harmonie des couleurs? Le ton, la température, la valeur (clair/sombre), la saturation...
Une autre toile de Klee, "Ancient Sound" sera une bonne illustration de cette composition.
"Ancient Sound" - 1925


A suivre...